Louange à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons :
La jurisprudence islamique est passée par différentes étapes. Il y eut un moment, au début du deuxième siècle de l’hégire où les écoles juridiques firent leur apparition. Durant cette période, apparurent les jurisconsultes les plus érudits comme Abû Hanîfa, Mâlik, al-Châfi’î et Ahmad, qu'Allah leur fasse miséricorde, dont les doctrines connurent une grande notoriété et virent de grands savants s’y rattacher. Ces écoles juridiques ne sont ni une division de l’islam ni l’invention d’une nouvelle Législation. Ce ne sont que des voies permettant de comprendre la Charia, d’expliquer ses Textes et de déduire les prescriptions religieuses à partir de ses sources, c'est-à-dire, le Coran, la sunna, le consensus et l’analogie.
Les divergences jurisprudentielles entre ces écoles ne découlent pas de fantaisies personnelles ou d’un esprit sectaire mais proviennent de nombreuses raisons. Parmi celles-ci figure le fait qu’un savant puisse ignorer une preuve concernant une question de jurisprudence, et par conséquent fasse un effort de réflexion pour trouver la signification de sa prescription et ne trouve pas la vérité. Le Prophète () a dit :
« Lorsque le juge prononce un jugement après un effort de réflexion et que son jugement s’avère faux, il en obtiendra une récompense. »
Alors qu’à l’inverse, on peut trouver un autre savant, qui a trouvé la preuve provenant de la sunna concernant cette question jurisprudentielle, et la met en pratique et se trouve par conséquent en conformité avec la vérité alors que ce n’est pas le cas pour le premier.
Il se peut également que la raison de la divergence soit due à la compréhension voulue de la preuve, que celle-ci soit un verset ou un hadith. Par exemple, les savants ont divergé sur la signification du mot « Qur’u » dans la Parole d’Allah : « Et les femmes divorcées doivent observer un délai d'attente de trois Qur’u » (Coran : 2/228) Il y a également d’autres raisons que cheikh al-Islam a réunies dans son épitre « Raf’ al-Malâm ‘an al-A’ima al-A’lâm ».
De plus, ces imams interdisaient à leurs partisans de les suivre aveuglément dans toutes leurs opinions. Ils leur ordonnaient plutôt de se conformer à ce qu’indiquaient le Coran et la sunna. L’esprit sectaire et la sclérose ne survinrent qu’après eux.
Par ailleurs, ces imams respectaient mutuellement leurs avis en prenant pour modèle les Compagnons (). Le Prophète () dit aux Compagnons lors de la bataille de Khandaq : « Qu’aucun d’entre vous n’accomplisse la prière du ‘Asr avant qu’il ne soit arrivé chez les Banû Qurayza » voulant par-là les presser de combattre les juifs là-bas. Cependant, l’heure de la prière arriva alors que certains Compagnons étaient en route et ces derniers divergèrent : Devaient-ils l’accomplir maintenant ou la retarder en laissant son heure s’écouler par obéissance au Prophète (). Certains d’entre eux dirent : « Nous l’accomplissons maintenant car le Prophète ne voulait pas que nous la retardions mais uniquement que nous nous dépêchions. » D’autres dirent : « Nous ne l’accomplirons qu’une fois arrivés chez les Bânû Qurayza même si pour cela nous devons l’accomplir après son heure. »
Malgré cela, le Prophète () ne blâma aucun d’entre eux car chacun d’eux avait agi selon ce qu’il avait compris de la parole du Prophète (). De même les compagnons ne se firent aucun reproche les uns aux autres mais ils étaient plutôt comme Allah les a décrits dans le Coran : « […] Et ceux qui sont avec lui sont durs envers les mécréants, miséricordieux entre eux… » (Coran : 48/29)
Les imams éminents après eux se comportaient également de la sorte. Certains d’entre eux considéraient qu’un baiser ou que le fait de manger la viande de chameau invalidait les ablutions alors que d’autres s’opposaient à eux. En dépit de cela, les uns accomplissaient la prière derrière les autres. Cela valait également pour d’autres questions jurisprudentielles à propos desquelles ils divergeaient. Nous n’avons entendu aucun d’entre eux dénigrer les autres. Et chacun mettait en pratique l’avis auquel son effort d’interprétation l’avait conduit.
Il n’est pas obligatoire de suivre en particulier une de ces écoles juridiques mais ce qui est obligatoire, c’est de suivre le Coran et la sunna. Dès qu’une preuve tirée de ces derniers se manifeste, elle fait autorité et il n’est pas permis de s’en écarter pour suivre l’avis d’un individu, quel qu’il soit. Al-Châfi’î, qu'Allah lui fasse miséricorde, a dit : « Les musulmans sont unanimes pour dire qu’il n’est pas permis à un musulman à qui la sunna du Messager d’Allah () apparaît clairement de délaisser celle-ci pour l’avis d’un quelconque individu. »
On ne rejette pas le Livre d’Allah, exalté soit-Il et la sunna du Messager d’Allah () pour l’avis de qui que ce soit, et nul n’a d’excuse auprès d’Allah pour avoir suivi un avis dont il sait pertinemment que celui-ci va à l’encontre d’une preuve (du Coran ou de la Sunna).
Dans tous les cas, la divergence des imams sur les questions jurisprudentielles ne sont en rien une division ou une scission au sein de la religion.
Quant à votre question : « Est-ce que ce que je fais est correct ou pas ? » nous répondons à celle-ci en disant que ce que vous faites en suivant votre imam est correct si Allah le veut. Il y a de nombreux hadiths mentionnant le fait d’accomplir le Witr en faisant trois rak’ats consécutives. Il y a également des hadiths interdisant le fait d’accomplir le Witr de cette manière car cela comporte une ressemblance avec la prière du Maghrib. Les oulémas ont donc concilié les hadiths en disant que l’interdiction doit être comprise comme telle dans le cas où la prière du Witr est accomplie en faisant trois Rak’ats avec deux Tachahhud car c’est cette manière de faire qui ressemble à la prière du Maghrib. Quant aux hadiths autorisant à le faire, ils concernent le cas d’un seul Tachahhud.
Il y a donc une souplesse de choix dans ce domaine si Allah le veut et cela n’implique pas obligatoirement les désaccords et la division entre les frères. Celui qui prie derrière un imam doit suivre ce dernier, qu’il accomplisse trois Rak’ats consécutives avec un ou deux Tachahhuds ou qu’il les sépare avec des salutations.
De même concernant ce qui est le mieux entre prier dans la mosquée la plus proche ou la plus éloignée. Il y a deux avis chez les oulémas et deux variantes dans l’école juridique de l’imam Ahmad. Ibn Qudâma a dit : « Est-ce que le mieux est de prier dans la mosquée la plus éloignée ou la plus proche ? Il y a deux variantes, l’une d’entre elles est qu’il faut viser celle qui est la plus loin afin d’accroître le nombre de pas faits, en recherchant ainsi une augmentation de la récompense divine et la deuxième est qu’il faut viser la plus proche car elle se situe dans le voisinage. Elle mérite donc plus qu’on y prie tout comme le voisin mérite plus d’être guidé par son voisin. »
Quant au fait de s’affilier à un groupe, cela ne vous est pas obligatoire selon la Charia et pas même recommandé, et la seule chose qui vous est obligatoire est d’être soumis à Allah, exalté soit-Il et de L’adorer en se conformant à ce qu’il y a dans Son Livre et dans la sunna de Son Prophète () selon la compréhension des pieux prédécesseurs de cette communauté parmi les Compagnons et leurs successeurs.
Nous ne connaissons personne parmi les oulémas ayant considéré comme obligatoire ou recommandé le fait de s’affilier à un groupe particulier.