Les sociétés constituent probablement l'un des aspects les plus importants de l'économie mondiale contemporaine tout comme elles ont une relation étroite avec la mondialisation parce que celle-ci n’est en fait incarnée que par une centaine de compagnies américaines et européennes qui cherchent, une fois avoir brisé les handicaps au niveau national, à unifier et à pénétrer le marché mondial via l'Organisation Internationale du Commerce. De ce fait, la mondialisation apparaît n’être, au bout du compte, que l’expression de la mainmise des grandes sociétés sur les marchés mondiaux et la garantie que le Nord riche reste riche et que le Sud pauvre reste pauvre. C’est la raison pour laquelle il y a, partout dans le monde occidental, de nombreuses manifestations contre la mondialisation.
Ce qui nous intéresse ici ce sont les sociétés dans l'économie islamique. Celles-ci se divisent en cinq catégories :
1 – La société à partenariat complet -2 la société de spéculation
-3 la société à base de confiance -4 la société à base d’efforts physiques -5 la société de négociation.
A noter qu’il est possible de fondre toutes ces catégories dans une seule société à l’image de ce que font les sociétés géantes.
Premièrement : La société à partenariat complet
Les deux partenaires mettent ensemble leur argent et se partagent le travail. Il s’agit d’un partenariat à part entière. Si, par exemple, l’un d’eux dépose mille dinars l’autre devra faire de même et alors ils travailleront ensemble.
Ce partenariat reste cependant soumis aux conditions suivantes :
1 – Pour les hanbalites le capital doit être de l’or et de l’argent mais, selon un autre avis, ce n'est pas nécessaire, ce qui est d’ailleurs correct. Par exemple, si j'ai des biens en monnaies sonnantes et trébuchantes et qu’un autre en a l’équivalent, on peut en faire un capital et y travailler ensemble.
2 – Les deux sommes d’argent doivent être déterminées, car le partenariat n’est pas valable si le montant est inconnu.
3 – Le capital doit d'être disponible et non en garantie ou en dette.
4 – Le bénéfice doit être partagé entre les deux partenaires en un pourcentage connu du bénéfice et non du capital.
Si, par exemple, l’un d’eux dit : Je veux 100 dinars par mois sa requête n'est pas recevable parce que non valable .D’ailleurs Ibn al-Mundhir a mentionné dans ce cadre qu’il y a un consensus selon lequel aucun d’entre eux ne devrait exiger une somme d’argent déterminée.
Deuxièmement : la société de spéculation:
Elle se définie comme étant le paiement d’espèces connues à ceux qui en font le commerce en contrepartie d’une part commune et connue de leur bénéfice ce qui signifie que le capital provient d’un côté, que le travail d'un autre et que le bénéfice est partagé entre eux comme mutuellement convenu.
La différence entre la banque islamique et la banque usurière est que la première est basée sur la spéculation tandis que la seconde est basée sur l’usure de la dette.
Les conditions de la société de spéculation (l'argent provenant d’un côté et le travail d'un autre):
1 - Le capital doit être de l’or et de l’argent (ce qui est correct c’est que cette condition n'est pas valable).
2 - Le capital doit être connu.
3 – Le bénéfice doit être connu entre les deux partenaires par pourcentage conformément à leur accord soit, par exemple, 20% des bénéfices pour le travailleur et 80% pour le détenteur du capital. Le pourcentage du bénéfice convenu entre eux devient obligatoire pour eux.
La banque islamique est basée sur le fait que les actionnaires dans le compte d'épargne sont ses partenaires dans la société de spéculation avec lesquels elle partage la tâche : elle fait le travail et eux ils procurent les fonds et, à la fin de l’exercice, ils se partagent le bénéfice comme convenu entre eux et en fonction de la contribution de chacun.
En effet, la banque islamique est spéculatrice et elle donne un pourcentage du bénéfice qui, contrairement à la banque usurière, ne provient pas du capital. Quand elle ne fait pas de bénéfice elle ne distribue rien aux actionnaires.
C’est ainsi le commerce. Il n'est jamais sans risque. On peut, dès lors, se demander comment la banque islamique peut éviter le risque de pertes et surtout la perte des clients. Eh bien la réponse est simple : tout comme quand tu veux choisir un employé, tu en choisiras un qui est actif, dynamique, intelligent et qui a de l'expérience et des connaissances, de même la banque islamique choisit, elle aussi, le client qui a beaucoup de projets de sorte que quand il lui arrive de subir une perte au niveau de l'un, il la fait compenser au niveau de l’autre. C’est pourquoi il est très rare qu’avec un détenteur de gros capitaux la banque accuse une perte sauf quand il y a une catastrophe générale telle une invasion extérieure ou un tremblement de terre et, dans ce cas, tout le monde perd y compris la banque usurière ou la banque islamique.
Prenons un exemple qui montre la différence entre le partage des dividendes provenant du capital comme le font les banques usurières et le partage des dividendes provenant des bénéfices. Ainsi, par exemple, la société Hepetko stipule dans son contrat qu’elle accorde un pourcentage du capital, ce qui est, par consensus, harâm. C’est ce pourcentage pourtant qui a induit en erreur certaines personnes qui ont cru qu’il était permis, ce qui n’est pas le cas, car il s’agit d’un pourcentage qui provient du capital et donc de montants spécifiques.
On peut, évidemment, arguer que le spéculateur peut bien me mentir au sujet du bénéfice et donc en diminuer le montant tandis que si je me mets d'accord avec lui sur une certaine somme d'argent, j’aurais garanti mon droit. Nous disons en réponse : Tu as fait cette hypothèse en ne prenant en compte que ta paresse et ton inaction en espérant, tout de même, gagner de l'argent sans travailler. Pour la Charia tu dois : soit faire confiance au spéculateur, soit le suivre pour bien vérifier la situation de ton bénéfice, soit payer un salaire mensuel aux travailleurs, soit encore prendre un pourcentage des fonds de la spéculation. Tout autre éventualité n'est pas envisageable parce que non permise.
Si maintenant quelqu'un dit : je veux louer le local aux travailleurs en échange d'une somme d’argent, nous serons alors devant deux possibilités :
La première : soit que le contrat de location porte sur la licence et cela n'est pas permis parce que la licence constitue une caution et la caution ne peut être louée.
La seconde : soit que tu leur achètes des équipements et tu les leur loues au prix du marché. Dans ce cas, il n'y a pas de tromperie. On ne peut pas, lors de l'accord sur le contrat de location, prendre en compte l’existence de la licence commerciale et c'est la seule issue conforme à la Charia.
Supposons que j’achète un autobus et que je dise au chauffeur : Voilà je te loue cet autobus à deux cents dinars, utilise-le comme tu veux. Dans ce cas l’autobus devient comme des fonds loués et le contrat devient un contrat de location et non de spéculation, à condition qu'il n’y ait pas tromperie. Si, par exemple, l’autobus se loue sur le marché à 50 dinars et que toi tu le lui loues à cent cinquante et que le reste du montant est en contrepartie de la caution ou de la résidence alors cela n'est pas permis, car sa location doit être identique à celle pratiquée sur le marché. Ou bien tu fais en sorte que les employés soient des salariés chez toi ou bien tu fais avec eux une société de spéculation si tu leur fais confiance.
Troisièmement : la société à base de confiance
Les oulémas la définissent ainsi : deux individus qui n’ont pas de fonds se partagent le bénéfice de ce qu’ils gagnent à partir de ce qu’ils achètent aux autres en vertu de la confiance placée en eux c'est-à-dire donc de leur responsabilité et de leur prestige non accompagné de moyens. Il s’agit donc d’une société détenue par des individus qui n’ont pas de capital disponible mais seulement un statut et une confiance rassurante pour les autres. C’est pourquoi ils peuvent, ensemble, acheter à terme et vendre en vertu du crédit et de la confiance dont ils jouissent, quitte à rembourser leur dette et à se partager les bénéfices au moment opportun.
Quatrièmement : la société à base d’efforts physiques :
Les oulémas la définissent ainsi : deux individus se partagent physiquement le travail qu’ils font concernant leurs biens licites tels le coupage de l’herbe, l'exploitation forestière ou la pêche. Ce genre de société n'a pas de capital et les deux partenaires travaillent avec ce qu’ils gagnent à partir de leurs propres efforts telle, par exemple, la pêche où les deux collaborent étroitement et ce qu’ils capturent de poissons le mettent ensemble puis se le partagent ou le vendent et s’en divisent le prix.
Cinquièmement : la société de négociation :
C’est un système par lequel chacun des deux partenaires délègue à l’autre les prérogatives de vendre, d’acheter et de disposer par rapport à toutes les compensations liées au capital et à accepter les actes qui lui semblent opportuns. De telles prérogatives pourraient également être mises en vigueur dans toutes les sociétés.
Ainsi, on peut avoir, au sein de la société à partenariat complet, une société de négociation. C’est le cas aussi des autres sociétés susmentionnées.
Il y a, à priori, quatre types de sociétés (la société de spéculation, la société à base de confiance, la société à partenariat complet, la société à base d’efforts physiques). Il se peut qu’il y ait entre les deux partenaires plusieurs types de sociétés, ce qui ne pose pas de problème. Leur partenariat peut inclure une société de spéculation et une société à partenariat complet sous la forme suivante : l’un des deux partenaires dépose deux mille dinars et l’autre deux mille aussi tout en s’occupant, en plus, du travail. Ainsi ils deviennent partenaires dans la société de spéculation et dans la société à partenariat complet, ce qui est tout à fait permis.
Les quatre types de sociétés peuvent se fusionner en une seule société géante. Dans ce cas, il conviendrait d’organiser toutes les transactions par ordinateur. L’essentiel est que leur fusion et leur incorporation les unes dans les autres ne posent aucun problème tant qu’il n’y a pas de contrats ou de conditions contraires à l'Islam. Toujours est-il qu’à priori les transactions sont autorisées.