Tout est relatif. Nous avons tous entendu ceci des milliers de fois. Seulement ici, ce n’est pas le casse-tête de science physique tant redouté par tous les étudiants que nous allons aborder, mais le "combat" opposant adultes et adolescents.
En grandissant, nos amis prennent une place et jouent un rôle très important dans nos vies. Ils nous comprennent, car ils vivent les mêmes choses que nous. Ils sont nos égaux. C’est pourquoi d’ailleurs lorsque nos parents nous sermonnent, ils rejettent notre argumentation et nous comparent à nos amis.
Ici rentre donc en jeu cette théorie de la relativité toute spéciale.
Lorsque nos parents jouent les prolongations, nous avons la fâcheuse habitude nous aussi à accabler nos amis afin d’éviter les critiques : Bon, d’accord, mais bon moi au moins je ne suis pas comme untel qui lui est plutôt du genre à faire ceci et cela, au moins tu pourrais reconnaître que tu as de la chance de m’avoir moi comme fils… . Ceci a plusieurs buts : affaiblir les critiques des parents en transformant nos erreurs et égarements en victoire tu pourrais reconnaître que tu as de la chance de m’avoir moi comme fils… , nous donner le sentiment que tout va bien et que nous sommes certainement meilleurs que beaucoup de gens que nous connaissons et que nos erreurs sont moindres en comparaison de celles des autres : moi au moins je ne suis pas comme untel qui lui est plutôt du genre à faire ceci et cela .
Et quoi ! Celui à qui on a enjolivé sa mauvaise action au point qu'il la voit belle... ? - Mais Allah égare qui Il veut, et guide qui Il veut - Que ton âme ne se répande donc pas en regrets pour eux : Allah est Parfaitement Savant de ce qu'ils fabriquent. (Coran 35 / 81).
Je me souviens lorsque j’étais jeûne et que j’avais une interrogation surprise, il m’arrivait parfois d’échouer car pris au dépourvu. Durant les jours qui suivaient, je rentrais à la maison, informais ma mère au sujet de l’interrogation surprise et tentais de faire de mon mieux pour atténuer la mauvaise nouvelle de ma mauvaise note sans oublier à chaque fois de dire : Tu sais, maman, personne n’a fait mieux que moi. L’interrogation était vraiment dure et tout le monde s’accorde à le dire. A vrai dire mes amis ont même eu des résultats bien inférieurs au mien. Même si cela était vrai et que j’avais le sentiment d’aller un peu mieux après, ce sentiment ne m’accompagnais pas longtemps, j’étais suspendu à la réponse de ma mère, la scrutant, guettant le moindre mouvement de sourcil de sa part et attendant sa réponse, ma mère dans un esprit d’encouragement était plutôt du genre à me dire qu’un accident arrivait à tout le monde, que personne n’en était à l’abri et que le plus important était de savoir rebondir.
En vérité, se comparer aux autres ne provient pas d’une intention mauvaise, celle de pointer du doigt leurs erreurs, mais serait un mécanisme maladroit de défense. Il est aussi assez facile pour les parents de retourner ce genre de stratégie contre leur jeune adolescent tout simplement en leur demandant : Et quant est-il des bonnes actions que tes amis font eux ? ou Est-ce que le fait qu’untel a un mauvais comportement fait de toi un être bon et permet de passer l’éponge sur tes erreurs ? .
Mais cela ne s’arrête pas ici, voyons la stratégie un petit plus profondément. Au moment où nous choisissons de faire entrer en scène nos amis pour leur dresser un portrait peu réjouissant, nous savons déjà que cette stratégie ne payera pas, que ce n’est qu’un moyen de gagner du temps. Il est évident que de rabaisser quelqu’un ne participe pas à redorer le blason d'un autre, c’est juste un moyen de montrer à nos parents que nous faisons face à une situation quelque peu compliquée pour nous et que nous avons du mal à assumer. C’est un appel au secours déguisé, un appel de détresse face à une solitude non assumée et cela constitue une prière envers Allah pour qu’Il nous pardonne.
Malheureusement, cet appel au secours n’est pas perçu comme tel. La plupart du temps il ne fait qu’envenimer la discussion car on reproche aux enfants de ne pas assumer (ce qui en vérité est exprimé par les adolescents eux-mêmes), ce qui finit par agacer tout le monde et ne règle rien.
Les parents devraient se méfier et être aussi prudents que s’ils marchaient sur des œufs. Avant tout, ils, en tant qu’êtres humains, sont parfois coupables d’appliquer le concept de la relativité dans leur vie. Par exemple l’idée qui consiste pour certaines femmes à justifier le fait qu’elles ne portent pas le hidjab car leur voisine qui elle le porte, colporte des commérages alors qu’elles ne le font pas et donc par conséquent que le port du voile n’est pas un signe de religiosité mais que la foi est plus une histoire de cœur, s’est malheureusement répandue parmi nos sœurs en Islam. Les hommes eux aussi ne sont pas épargnés, certains justifient qu’ils se rasent la barbe par de faux arguments comme nous avons pu voir pour les femmes et le hidjab. Se pencher sur la foi des autres n’est pas de notre ressort, Allah seul connait ce que contiennent les cœurs.
Ainsi que les enfants aient recours à cette stratégie, ne doit pas paraître choquant pour les parents. Les parents doivent parler de ces dangers calmement avec leurs enfants et lutter ensemble contre ce mal. L’idée est de commencer la discussion en demandant les raisons qui ont poussé les enfants à commettre la faute, de leur demander ce qu’ils pensaient faire en accomplissant ce qu’ils ont fait. Partager ses expériences et ses moments de faiblesse peut les aider à comprendre que personne n’est parfait mais il faut rappeler ici que de se comparer aux autres n’a jamais aidé qui que ce soit à se sentir mieux et à se déculpabiliser. Chacun porte son fardeau, nul besoin de mentionner ceux des autres, car cela ne fait pas disparaître les nôtres. Donner confiance à notre jeunesse en lui rappelant les moments où nous avons été fiers d’eux, les moments où nos jeunes ont agis en bons musulmans. La comparaison peut être bonne si l’on se compare à ceux qui sont meilleurs que nous, car alors elle aura pour effet de nous encourager à produire plus d’efforts.
Le plus important c’est de leur apprendre qu’au Jour du Jugement ce ne sera pas une question de relativité mais une question d’individualité.
Et au Jour de la Résurrection, chacun d'eux se rendra seul auprès de Lui. (Coran 19 / 95].
Par : Sobia Asrar