Comment se débarrasser des bénéfices provenant de transactions illicites :
Pour commencer, il est important de rappeler que la personne qui conclut une opération ou une transaction, en ayant la certitude qu’elle est licite, en se basant sur un effort jurisprudentiel ou sur une fatwa, qui réalise des bénéfices puis se rend compte qu’à l’évidence elle s'est trompée et que cette opération n’est pas permise, peut prendre et dépenser l'argent provenant de cette transaction, mais ne doit plus recommencer.
Ibn Taymiyya, qu'Allah lui fasse miséricorde, a dit : La même chose s'applique à tout contrat que le musulman pensait être licite en se basant sur une interprétation jurisprudentielle. Ce genre de contrat dont on a tiré un bénéfice pensant qu’il était licite, n’est pas annulé ni par un jugement, ni par une révision de l'interprétation jurisprudentielle. Cependant, si les deux parties ayant conclu le contrat ont recours au jugement d'une troisième personne avant de réaliser des bénéfices, qu’il leur apparaît qu’ils se sont trompés et reviennent sur leur opinion de départ, le bénéfice qu'ils ont réalisé en croyant à la licéité de leur contrat n'est pas remis en cause. S’il leur reste leur capital de départ plus une somme usuraire, ils doivent se débarrasser du surplus provenant de l’usure et garder leur capital de base et celui qui a fait des bénéfices à partir de la somme usuraire ne doit pas les rendre s’il les a touchés en croyant à leur licéité. (Madjmû’ al-Fatâwa, Ibn Taymiyya).
Par contre, si une personne s’engage dans une opération ou une transaction sans demander conseil ou sans faire l'effort de savoir si cela est licite, il doit retirer de son argent ce qui est illicite, car il n’a pas d’excuse.
Celui qui désire se débarrasser de l’argent illicite obtenu par ce genre de contrat se trouve dans l’une de ces trois situations :
La première : Il touche des bénéfices provenant de ses actions. Dans ce cas il doit exclure la part de bénéfice qui correspond aux fonds illicites et aux investissements interdits dans ces actions.
La deuxième : Il réalise des bénéfices à cause de la hausse du prix de l’action et de la spéculation sur celle-ci. Dans ce cas, il doit exclure la partie illicite dans la valeur totale de l’action, car il a vendu une action contenant du licite et de l’illicite et cette vente est valide concernant la partie licite, mais invalide concernant la partie illicite comme dans les questions de tafrîq al-Safaqa (division d’un contrat). S’il connaît le montant de la part illicite, il doit l'exclure. Sinon, il doit essayer d’en faire une estimation et exclure la somme qu'il pense adéquate pour purifier son argent.
La troisième : Il touche un bénéfice provenant de la vente d’une action illicite, dans ce cas, il a certes vendu une chose illicite sur laquelle il n’y a aucun doute. Il doit donc exclure la totalité de ce qu’il a touché, car ce qu’est interdit à l'achat est également interdit à la vente.
Exclure la part illicite signifie ici la dépenser dans le bien avec l’intention de se débarrasser de l’argent illicite et non pas avec l’intention de faire l’aumône, car Allah, exalté soit-Il, est Bon et n’accepte que ce qui est bon.
Vendre le droit de souscription :
Cela signifie qu’une personne donne à une autre personne ses papiers d’identité contenant son nom et les noms des membres de sa famille afin de faire une souscription dans une compagnie à leur nom et qu’il lui donne en échange une certaine somme d’argent.
La raison de cela est que certaines compagnies répartissent les actions à parts égales entre les personnes qui font une souscription lorsque leur nombre est très grand. Donc, s’il fait plusieurs souscriptions il obtient un pourcentage supérieur d'actions.
Il n’est pas permis de toucher de l'argent en échange de cette pratique, car le contrat est au nom d’une personne et le nom n’est pas une propriété au même titre qu'il n'est pas une marque commerciale. La marque commerciale attire les clients et distingue le produit, mais le nom personnel n’a aucun avantage si ce n’est de prendre la part des autres dans les actions.
Il faut faire la différence entre la propriété utile et celle qui vise un profit.
Al-Qarâfî expliqua cela et dit : La propriété utile c'est qu’une personne profite elle-même et elle seule d'un bien et la propriété du profit a une signification plus large et plus générale. Elle désigne la personne qui profite elle-même d'un bien, mais qui peut aussi faire bénéficier quelqu’un d’autre de ce bien en échange d’une compensation ou sans compensation.
Exemple du premier cas : les logements situés dans les écoles, les associations, les mosquées et les marchés ; on peut en bénéficier soi-même, mais si on veut les louer ou en obtenir une compensation, cela est interdit.
Par contre, la propriété du profit c'est lorsqu'une personne loue une maison ou la prête. Cette personne a le droit de la louer à quelqu’un d’autre. […] (Kitâb al-Furûq, al-Qarâfî).
Vendre son nom personnel est en fait un moyen détourné de contourner le système mis en place par la compagnie et qui vise à distribuer les actions équitablement entre les gens qui souscrivent afin qu’un plus grand nombre de gens en bénéficie. C’est donc une fraude et un détournement et ces deux choses sont illicites.
Les infractions à la Charia dans la vente et l'achat des actions :
Parmi ces infractions soulignons la vente à terme, la vente à découvert, l’achat sur marge ou l'achat à effet de levier, les accords illicites entre les marchands et la formation de groupes visant à contrôler le marché boursier au détriment des clients.
La vente à terme : c'est une vente dans laquelle on conclut un contrat de vente d’actions dont le paiement et l'acquisition interviennent après une période déterminée
La vente à découvert : elle consiste à vendre à terme un actif que l'on ne détient pas le jour où cette vente est négociée mais qu'on se met en mesure de détenir le jour où sa livraison est prévue. L'actif vendu à découvert est généralement un titre, mais on peut aussi vendre des devises ou des matières premières à découvert. Si la valeur de l'actif baisse après la vente à découvert, le vendeur peut le racheter au comptant et dégager une plus-value
L’achat sur marge : c’est le fait d’acheter des actions pour un montant qu’on ne possède pas entièrement en payant une partie de la valeur et en empruntant le reste au vendeur avec compensation et en laissant les actions en gage auprès du vendeur pour garantir ses droits.
La vente à terme c'est le fait de vendre sa dette en contractant une nouvelle dette et le Prophète () a interdit la vente d’une dette par une dette. (al-Hâkim). Les savants sont d'accord sur la signification de ce hadith.
Ibn Taymiyya, qu'Allah lui fasse miséricorde, a dit : Le Prophète () a interdit la vente d’une dette par une autre dette. Les contrats de vente sont des moyens de prendre possession des objets et les prix ne portent que sur la marchandise. On ne peut donc pas vendre à terme car cela comporte de la corruption et de l'injustice en contradiction avec le but des prix et des contrats. (Madjmû’ al-Fatâwa).
De plus, les achats sur marge comportent un emprunt usuraire illicite.
Ces trois transactions n'ont pas pour but de conclure une vente ou un achat réel, mais le but est de jouer sur la hausse ou la baisse des prix et ce sont des transactions fondées sur le risque sans volonté réelle de prendre possession de l'objet vendu. C’est pourquoi, en général, il n’y a pas d’échange de billets mais on donne uniquement la différence du prix à l’autre partie.
Le jeu de hasard est une transaction où l’on risque de gagner ou de perdre en se basant uniquement sur la prise de risque.
C’est pourquoi un groupe de savants a dit : le jeu de hasard est tout ce qui comporte un risque.
Il ne fait aucun doute que le pourcentage de risque sur les marchés boursiers est très élevé et nous entendons sans cesse parler de l’énorme préjudice causé par les spéculateurs en raison des risques qu’ils ont pris sur les marchés. Ces préjudices suffisent pour interdire ces formes de transactions et tous les interdits qu'elles comportent.
De même, les convenances entre les commerçants pour contrôler le marché et la manipulation des prix pour faire des bénéfices au détriment des autres investisseurs est illicite. En effet, la Charia ne permet pas de gagner de l’argent en trompant les gens et il est interdit de porter préjudice aux autres que ce soit avec l’intention de gagner de l’argent ou avec une autre intention.
Abû Hurayra, qu'Allah soit satisfait de lui, a rapporté que le Prophète () a dit : Le fourbe n’est pas des nôtres. (Mouslim)
Abû Sa’îd al-Khudrî, qu'Allah soit satisfait de lui, a rapporté que le Prophète () a dit : Ne nuisez pas aux autres et ne permettez pas qu'on vous nuise. (Ibn Mâdjah).
Tout argent gagné en portant préjudice ou en trompant autrui, ou encore en exposant autrui aux rumeurs est interdit et cet argent est illicite.
La règle concernant la taxe d’émission des actions :
En soumettant leurs actions à la souscription, certaines compagnies ajoutent intentionnellement à la valeur de l’action une somme appelée : taxe d’émission. Le but de cette taxe est de couvrir les frais d’émission des actions et il n’y a pas de mal à cela à condition que le montant de cette taxe soit estimé de manière correcte et qu’elle représente réellement les frais d’émission de l’action. Par contre, si elle dépasse cela, alors cela revient à prendre illégalement l’argent des actionnaires.
La Zakat sur les actions :
Les savants divergent sur la manière de payer la Zakat sur les actions. L’avis prédominant est sans doute celui du Conseil islamique de la jurisprudence qui a conclu qu'il faut traiter avec les compagnies d’actions comme avec les individus. C’est-à-dire que la compagnie paye la Zakat sur ses actions au même titre que l'individu paye la Zakat sur son argent en prenant en considération le montant du capital,et son genre ainsi que le nisâb (somme minimum légale sur laquelle la Zakat est due).
Si la compagnie ne paie pas la Zakat sur son argent, l’actionnaire doit, à travers les comptes de la compagnie, calculer la Zakat qu’il doit payer sur ses actions en s’informant d'abord sur la somme globale de la Zakat que la compagnie doit payer puis en payant en Zakat ce qui est propre à ses actions...
S’il n’est pas en mesure de calculer ce montant, et s’il a acheté des actions dans le but de faire une plus-value sur leur valeur il doit payer 2,5% sur le bénéfice réalisé après l’écoulement d’une année entière.
S’il a acheté ces actions dans le but de les revendre lorsque leur valeur augmentera, il doit payer la Zakat dessus comme c’est le cas avec les marchandises commerciales. Il paye alors 2,5% de leur valeur et du bénéfice.
Donc, l’actionnaire qui veut tirer bénéfice de la hausse annuelle du prix de l’action doit payer la Zakat sur la valeur réelle de l’action alors que le spéculateur qui veut revendre l’action lorsque sa valeur aura augmentée doit payer la Zakat sur la valeur marchande de celle-ci comme pour les marchandises commerciales.
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