Les oulémas ont rassemblé les raisons pour lesquelles certains contrats de vente sont interdits dans l'économie islamique. Ainsi ont-ils recensé ceux qui suivent :
La première raison :
Lorsque l’objet de la vente est déjà interdit ou est de nature impur, il entre dans la règle générale selon laquelle tout ce qu’Allah a interdit, son prix l’est aussi. Parmi les exemples qui illustrent ceci, on peut citer l'interdiction qui frappe la vente des chiens, du sang, des idoles, l’argent payé à une prostituée ou à un diseur de bonnes aventures. Djâbir (qu'Allah soit satisfait de lui) a dit : J'ai entendu le Prophète () dire qu’Allah a interdit la vente de l'alcool et de la viande de l’animal mort (sans l’invocation sur lui du nom d’Allah) ainsi que le porc et les idoles . On a dit au Prophète () : Ô Messager d'Allah, que dire des graisses des animaux morts sans invocation du nom d’Allah sur eux, que dire si on les utilise pour peindre les navires, pour oindre le cuir et pour allumer la lumière? Il répondit que c’est interdit avant d’ajouter : qu’Allah maudisse les Juifs, lorsque qu’Il leur a interdit d’utiliser la graisse, ils l’on fait fondre puis l’on vendue et en ont utilisé le prix (Rapporté par al-Djama')
Abû Djuhayfa a dit : Le Messager d'Allah a interdit le prix du sang, du chien, ce que gagne la prostituée, et il a maudit la femme qui fait des tatouages et celle qui demande qu’on lui en fasse, l’utilisation de l'usure pour soi ou pour les autres et il a maudit les sculpteurs" (Boukhari et Mouslim).
L’interdiction porte aussi sur la vente de ce qu’on appelle [al-mi’zâ al-châmiya] [la chèvre du moyen orient], cette habitude qui s’est récemment répandue dans le Golfe et qui est l’œuvre des gens ayant une forte tendance vers l'extravagance et le gaspillage. Il s’agit d’une sorte de penchant pour les vanités tel le jeu dans la salle de bain. Ainsi dans ces extravagances le prix du bouc peut parfois atteindre un million de riyals. Il s’agit en fait d’un comportement qui relève de la sottise et de l’extravagance interdites. Aussi, l’homme qui se permet de débloquer un montant aussi colossal rien que pour s’acheter une bête dans l’unique but de s’en vanter et de s’en s’enorgueillir n’est qu’un farfelu.
La deuxième raison :
Que le contrat soit une excuse pour commettre un péché telle, par exemple, la vente pendant l'heure de la prière du vendredi, la vente des armes en temps de guerres et de conflits, la vente de l'alcool à ceux qui en font du vin, etc.
La troisième raison :
Que le contrat comporte une tromperie comme les jeux du hasard.
***Parmi les exemples contemporains de ce genre de contrats, il y a le contrat d’assurance, la vente par le vendeur de ce qu’il ne peut pas livrer comme la vente du poisson dans l'eau et des oiseaux dans l'air.
*** Cela inclut aussi la vente d’un article en l’évaluant uniquement par le toucher, vente dont on rapporte qu’elle est interdite. Elle consiste à ce que deux individus se vendent un vêtement en se limitant, pour l’évaluer, au toucher de sa surface sans l’étendre pour le voir complètement.
*** Cela inclut également la vente par la munâbadha qui consiste à ce que l’un dise à l’autre : jette-moi ce que tu as et je te jette ce que j’ai et ensuite la vente est conclue.
*** la vente par la muhâqala qui est la vente des aliments encore dans leurs épis.
*** la vente de la corde de la habla : il s’agit de la vente de la viande de la chamelle à un prix différé jusqu’à la naissance de son chamelon.
*** la vente dite de la mukhâdara qui consiste à vendre les fruits alors qu’ils sont toujours verdâtres et donc non encore clairement mûrs.
*** la vente dite de la mu'âwama qui consiste à vendre les arbres pour une période pluriannuelle.
Toutes ces ventes sont interdites et on rapporte qu’elles sont toutes défendues en raison des dégâts et des risques qu’elles comportent et aussi parce que leur conséquence est inconnue. C’est pourquoi la Chari’a pris soins de les interdire.
*** Parmi les exemples contemporains chez nous, il y a ce qu’on appelle la vente des perles dans leurs coquilles. Cela consiste à acheter un gros sac rempli de coquilles dans l’espoir d’y trouver des perles. Mais au cas où rien n’est trouvé alors c’est la perte, même s’il est vrai que l’on peut trouver une conque où il y a une perle dont la valeur peut dépasser largement celle de dix sacs.
La quatrième raison :
Que le contrat implique des dommages comme le monopole, la fraude, l’offre de la vente de ce qu’un autre a déjà offert de vendre, le surenchérissement exercé par celui qui n’a pas l’intention d’acheter mais tout simplement d’augmenter artificiellement les prix pour tromper un autre dans le cadre d’une vente aux enchères, la vente par celui qui vit en ville à celui qui n’y vit pas et ne s’y connaît pas, le fait d’aller à la rencontre des fournisseurs de bétails avant qu’ils ne viennent au marché pour connaître les prix, etc.
La vente par celui qui vit en ville à celui qui n’y vit pas et ne s’y connaît pas est interdite en raison du hadith rapporté par Ibn 'Umar selon lequel : Le Prophète () a interdit la vente par celui qui vit en ville à celui qui n’y vit pas (Boukhari et Mouslim).
Concrètement cela veut dire que celui qui vit dans le désert se rend en ville pour faire vendre sa marchandise au prix actuellement pratiqué mais que, avant d’y arriver, il est contacté par quelqu’un de la ville qui le prie de lui confier l’affaire pour qu’il lui fasse graduellement couler sa marchandise avec un meilleur prix.
Mais cela porte préjudice aux autres.
Quant à aller à la rencontre des fournisseurs de bétails ou de marchandises, etc. avant leur arrivée au marché , il s’agit d’un acte interdit en raison du hadith rapporté par Ibn ‘Abbâs (qu'Allah soit satisfait de lui) selon lequel le Messager d'Allah () a dit n’allez pas à la rencontre des fournisseurs de bétails avant leur arrivée au marché ().
Cela signifie qu’il est interdit d’aller à la rencontre des fournisseurs de bétails ou de marchandises avant leur arrivée à la ville de crainte de les empêcher de voir le marché pour avoir une idée des prix et pour pouvoir profiter et donner aux autres l’occasion de profiter. Il n’est donc pas permis aux commerçants d’intervenir pour traiter directement, hors de la ville, avec les fournisseurs pour leur acheter leurs marchandises.
En agissant ainsi les commerçants ne portent pas seulement préjudice aux fournisseurs qui ne connaissent pas le prix du marché, mais également aux autres dans la mesure où ils interfèrent dans le prix qu’ils manipulent en leur faveur.
La cinquième raison :
Le contrat ne doit pas porter sur quelque chose qui devrait être donné gratuitement sans aucune contrepartie tels, par exemple, l'eau, les pâturages et le feu car ce sont des services que se partage tout le monde. C’est le cas aussi du taureau que l’on pourrait, contre rémunération, prêter à d’autres pour féconder leurs vaches, ce qui est tout à fait interdit car cela fait également partie des services qui ne doivent pas être mis à prix ni donc jamais soumis à un contrat de vente.
Un exemple de cela est ce qu’on raconte au sujet de la question qu’on a posée à Cheikh al-Islam Ibn Taymiyya concernant le transport, par des personnes, d’abeilles d’une région à une autre et de la possibilité pour les habitants de la région de réclamer une compensation en contrepartie de ce que les abeilles consomment pendant qu’elles sont chez eux ?
Il répondit ainsi : Louange à Allah. Les propriétaires des abeilles n’ont pas à payer quoi que ce soit aux habitants de la région en contrepartie des substances que leurs abeilles consomment pendant qu’elles s’y trouvent, tant leur consommation est si insignifiante qu’elle ne diminue en rien leur possession. Aussi le miel provient des substances des arbres qui sont tout à fait permises et davantage susceptibles d’être données gratuitement que les pâturages d’autant plus que seules les abeilles peuvent les cueillir. Mais si le propriétaire des terrains a des abeilles celles-ci doivent avoir la priorité pour la consommation desdites substances. Quant aux autres abeilles il peut interdire leur consommation si elle lui porte préjudice. Toujours est-il qu’Allah sait mieux t (Majmû’ al-fatâwa 29/220).
La sixième raison :
Le contrat de vente ne doit pas non plus porter sur quelque chose qu’on ne possède pas et qui ne nous appartient pas comme la vente d'un produit se trouvant avec d'autres personnes ou la vente des organes humains et ainsi de suite. Mais on peut faire don d'organes humains à condition que la personne à laquelle on fait don soit dans un besoin absolu et que sa vie nécessite une transplantation d'organes et que le donateur, en raison de son geste, n’expose pas sa vie au danger. Allah le Tout Puissant dit : Et ne vous jetez pas par vos propres mains dans la destruction (Coran 2/195). Si l’organe provient d’un corps déjà décédé, il faut que la vie du patient soit dans un tel état qu’elle ne peut plus vivre sans la transplantation de l’organe de la personne décédée.
La septième raison :
Le fait que la vente comporte de l'usure et c’est ce que nous verrons plus tard en détail.
La huitième raison :
Le fait que la vente comporte une ruse ou des prétextes pour pratiquer l'usure, telle la vente d’al-‘ina (vente à terme) qui consiste à vendre un produit à terme puis à revenir pour le racheter comptant à un prix moins cher que le prix avec lequel on l'a vendu.
La neuvième raison :
Certains oulémas ont ajouté à ces raisons le fait que la vente porte sur quelque chose d'inutile en donnant comme exemple la vente des chats dont on rapporte, de sources authentiques, que son interdiction est mentionnée dans le Sahîh Muslim. Certains font valoir que cette section devrait être incluse au titre de ce qui doit être donné gratuitement.