Un voyage inoubliable en Chine musulmane

5987 2259

Ce voyage en Chine fut véritablement pour moi un voyage d’une vie qui me changea en profondeur, il changea ma vision des choses. Laissez-moi donc vous raconter ce qui nous est arrivé là-bas et ce à quoi nous avons été confrontés durant ce périple, essayez de lire ce modeste récit avec votre cœur et alors peut-être que mon expérience changera un peu également votre vision de la vie.
Nous sommes arrivés à l’aéroport de Langu, qui est un petit aéroport, et la première chose qui nous a frappés est que les employés qui y travaillaient se déplaçaient en vélo. Nous avons donc pris un autobus qui nous a emmené à l’université de Langu en environ une heure, la route était difficile du fait des nombreux virages de montagne que nous avons dû emprunter, mais nous sommes bien arrivés grâce à Allah. Il nous faut signaler qu’au début de ce voyage nous avons été confrontés à un grand problème : la difficulté de communication avec les Chinois, car en effet ils sont très peu à parler la langue anglaise, pour voyager à travers le pays il faut nécessairement avoir avec soi un traducteur, quoi qu’il en soit nous sommes allés dans un hôtel, nous y avons rencontré notre hôte, ce fut une belle rencontre, nous avons évoqué avec lui la situation des communautés musulmanes chinoises, nous lui avons également parlé de nos activités en Egypte en tant qu’association travaillant dans le domaine de la prédication islamique, puis nous nous sommes mis d’accord pour nous rencontrer à nouveau le lendemain afin de visiter l’université et les mosquées de Langu.
Le deuxième jour nous avons donc visité l’université de la ville, celle-ci est en fait un bâtiment ayant plusieurs étages, elle est extrêmement bien organisée – nous nous y attendions – et nous y avons trouvé tout ce que désire et dont rêve un étudiant en termes de livres et de moyens aidant à l’acquisition de connaissances. Puis nous avons visité les salles où les étudiants travaillent, elles sont immenses, malgré tout on nous a dit qu’il était très difficile d’y trouver une place du fait du grand nombre d’étudiants. Tous ceux qui y étudient le font avec un très grand sérieux, leur attitude a retenu notre attention, ce sérieux est sans conteste le secret du progrès, ceci n’est pas seulement vrai qu’en Chine mais partout ailleurs dans le monde, car en effet nous voyons qu’à travers l’histoire le secret du développement des civilisations a toujours été la science, l’apprentissage du savoir et l’envie de se perfectionner. Pour ma part je suis persuadé que l’Islam nous pousse à cela, c’est ainsi qu’on voit dans le Coran et la Sunna qu’Allah a honoré les chercheurs de science de nombreux honneurs, par exemple, nous trouvons dans la Sunna les hadiths suivants : Celui qui emprunte le chemin de la science, alors Allah lui facilitera son chemin vers le Paradis ou Les Anges étendent leurs ailes à celui qui cherche la science : par satisfaction de ce qu’il fait ou Les habitants des cieux et de la terre et même la fourmi dans sa fourmilière et le poisson demandent pardon pour celui qui initie les gens au bien . En Islam, la dignité des savants est donc immense, rappelons en sus le verset les concernant, Allah, exalté soit-Il, dit : Demandez donc aux gens du rappel si vous ne savez pas (Coran 16/43).
Puis nous avons visité la ville universitaire dédiée aux étudiants étrangers, cette dernière convient parfaitement à ces étudiants, on y trouve toutes les nationalités du monde. Ensuite, nous avons fait un tour pour visiter les différentes mosquées de Langu, ce fut là une magnifique promenade, je n’imaginais pas voir autant de mosquées en Chine, notons que ces dernières sont totalement financées par les fidèles chinois. En fait, je ne trouve vraiment pas de mots pour exprimer mon sentiment face à cette réalité, mon cœur était en joie à chaque fois que je voyais une mosquée là-bas. Dans toutes les mosquées on trouve des cruches et des robinets d’eau pour se laver, elles sont toutes d’une grande propreté, de plus elles comportent toutes des classes dédiées à l’apprentissage de la langue arabe ainsi que d’autres matières, certaines de ces mosquées sont bâties dans un style architectural traditionnel chinois alors que d’autres sont faites dans un style moderne. Ces observations m’ont amené à méditer et à penser aux mosquées qui étaient construites à l’époque de l’âge d’or de la civilisation islamique, en fait toutes les particularités que j’observais aujourd’hui dans les mosquées chinoises y étaient déjà existantes et il y en avait même bien d’autres. En fait, nous ne serons pas une grande civilisation si nous ne prenons pas soin de notre Islam et de notre culture, nous savons en outre que les mosquées ont produit des hommes de grande valeur qui ont travaillé sans relâche pour cette religion jusqu’à la mort. Et si nous regardons l’histoire, nous verrons que les mosquées n’ont pas seulement servi aux adorations, mais, par exemple, durant l’âge d’or de l’Islam, elles comportaient des bibliothèques où les fidèles pouvaient sans problème compulser les livres, des dispensaires ou bien des jardins, et quand on les regardait, on pensait voir de magnifiques châteaux, ce développement des mosquées n’était pas une chose nouvelle ou rare à l’époque, et c’est pour cela qu’elles produisirent de nombreux grands savants.
Puis après ce superbe tour des mosquées de Langu, nous avons gravi les montagnes où nous nous sommes postés sur l’éminence la plus haute de la région afin d’avoir une vue imprenable et d’ensemble sur Langu, ce fut tout bonnement magnifique. La dernière visite que nous fîmes durant ce jour fut la visite extraordinaire de la mosquée al-Kawthar. Dès que nous avons pénétré cette dernière, nous y avons trouvé des étudiants en rangs en train de nous attendre, j’ai salué chacun d’entre eux, puis on m’a demandé de leur faire un petit discours afin de les encourager, ce que je fis grâce à Allah, puis j’ai pris une photo souvenir avec eux. En réalité, je dois le dire que ce sont eux qui m’ont donné du courage, et leur influence sur moi fut bien plus grande que mon influence sur eux.
Parlons donc un peu de cette mosquée al-Kawthar, laquelle est vraiment superbe, et chose étonnante elle se trouve au milieu d’une forêt. Ainsi, cette mosquée est conçue pour accueillir en pension complète environ 90 étudiants à partir de l’âge de quinze ans, ces derniers y passent quatre ans afin d’y apprendre la langue arabe et les matières religieuses, son imam s’appelle Sa’îd et il est en effet heureux (sa’îd en arabe) dans cette vie et le sera dans l’au-delà si Allah le veut. Ce dernier nous a appris qu’il y a six étudiants en train d’apprendre par cœur le Coran en entier, et ce, bien qu’ils ne parlent pas la langue arabe, car ils ne peuvent pas la pratiquer. Est-ce que vous ressentez ce que je ressens ? Je m’adresse à ceux qui parlent parfaitement l’arabe : où en êtes-vous avec l’apprentissage du Coran et des sciences islamiques ?!

Maintenant je voudrais vous parler de ce qui fut la cause de nombreux changements en moi, et notamment ma manière d’appréhender la vie. Il s’agit en fait de notre visite dans la ville de Lanshia. Ceux qui vivent dans cette ville sont des gens très simples, très bons et très souriants malgré les persécutions qu’ils subirent de la part du gouvernement. Ces gens se lèvent pour prier la prière du Fajr, puis les femmes se rendent à l’école qui jouxte la mosquée afin d’y apprendre le Coran. Lanshia est une petite commune se trouvant au cœur d’un district appelé Lanjia se trouvant lui-même dans une province appelée Qanshu, on trouve dans cette dernière environ 300 000 musulmans, ils représentent 56 % des habitants de la province, ils croient en Allah et ils se conforment aux piliers de l’Islam. L’agriculture est considérée comme la principale activité économique des musulmans de Lanshia, mais certains autres musulmans pratiquent le commerce. Les musulmans de cette ville sont attachés à leurs traditions et leurs coutumes et notamment en matière de boisson et d’habillement, ils commémorent les fêtes chinoises, comme la fête du printemps ou la fête de Yuan Chiu, et bien sûr les fêtes musulmanes, de même qu’ils jeûnent durant le mois de Ramadan, il faut noter qu’ils suivent l’école juridique hanafite.
Ainsi, nous avons visité quelques mosquées de la ville de Lanshia, lesquelles sont huit en tout, on trouve en outre des écoles juxtaposées à ces mosquées, on peut dire de manière générale que toutes ces mosquées comportent chacune sa propre école ayant ses frais de fonctionnement annuels, le nombre d’étudiants dans ces mosquées-écoles varie entre 200 et 600. Chacune de ces mosquées a un directeur et un imam, ce dernier est très considéré dans la communauté, les gens font montre à son égard d’un très grand respect, par exemple lorsque l’imam entre dans la mosquée, les fidèles s’écartent afin de le laisser passer. C’est là quelque chose d’essentiel, car si dans une société disparaissent le bon comportement, le respect du grand et du petit et la miséricorde du grand envers le petit, alors la bonne moralité disparaît également. Notons également que dans certaines mosquées des bénévoles, ayant précédemment étudié dans ces mosquées, se chargent d’enseigner la lecture du Coran aux personnes âgées.
Nous avons en sus visité l’Institut d’études islamiques, lequel accueille environ 600 élèves, il est considéré comme l’un des plus grands instituts dédiés aux matières islamiques en Chine, il fut fondé par cheikh Bahâ al-dîn Ma tchi Tchang, cet homme consacra sa vie à diffuser l’enseignement des sciences islamiques et à créer les conditions d’une renaissance de l’Islam dans ce pays, qu’Allah l’en récompense. C’est le directeur de l’Institut et son adjoint ainsi que la plupart des enseignants qui nous ont accueillis, un dialogue s’est alors instauré entre nous, nous avons été très étonnés de constater qu’ils suivaient ce qui se passait en Egypte, ils ont même analysé avec justesse les événements qui s’y déroulaient, ils nous demandèrent de dire au Docteur Morsi qu’ils priaient pour qu’il réussisse et qu’ils lui conseillaient de suivre le modèle turc du point de vue du changement (NdT : c’était avant le coup d’Etat militaire).
Ensuite, nous avons visité une école primaire au cœur de la montagne, elle a pour nom Yasmine, elle fut fondée et elle est dirigée par le cheikh Abû Bakr, c’est un ancien étudiant de l’Université islamique de Médine. Cette école accueille 198 enfants, je signale que c’est l’un des lieux les mieux organisés que j’ai vus, ceci est dû à un encadrement de grande qualité, en outre la nature y est excellente et saine, on y trouve divers jeux ainsi que tous les équipements nécessaires à ce type de lieu éducatif ; il est incontestable que le personnel encadrant de cette école est en train de construire une communauté musulmane solide, nous avons été étonnés de voir que de nombreux enfants commencent à apprendre par cœur le Coran dès le primaire, que les musulmans des pays arabes se réveillent donc !

Je n’arrive toujours pas à mettre mes idées en ordre dans ma tête, elles s’y bousculent littéralement. J’ai voulu décrire le côté concret de cette visite, mais en ce qui concerne son côté spirituel, on peut dire que les musulmans chinois en général et ceux de Lanshia en particulier font montre de générosité et d’un bon accueil enjoué à l’égard des visiteurs. Pour ce qui est de leur générosité d’hôtes et de leur comportement, je dois dire qu’ils suivent là les traces des Compagnons.
Ensuite, nous avons pris l’avion pour le Yunnan afin de visiter le centre islamique se trouvant à Kunming. Nous fûmes accueillis par le frère ‘Abdallah, un ancien de l’Université islamique de Médine. La ville de Kunming est considérée comme la capitale du Yunnan, environ 50 millions de personnes vivent dans cette province dont 800 000 musulmans, lesquels se concentrent dans la capitale. Ainsi, l’Institut de la ville de Kunming compte une centaine d’étudiants, garçons et filles, qui ont entre 16 et 23 ans, ils étudient la langue arabe ainsi que les matières ayant trait aux sciences islamiques. Après la visite de l’Institut, nous décidâmes d’aller faire un tour dans Kunming, nous avons alors prié la prière du vendredi dans l’une des mosquées de la ville.
Puis ce fut l’heure du retour vers notre pays, nous y emmenâmes dans nos bagages un immense espoir pour ce qui concerne l’avenir de cette communauté bénie et gagnante, si Allah le veut, des musulmans de Chine.
 

Articles en relation