Une mère reprend une donation faite à sa fille Fatwa No: 262309
- Fatwa Date:23-7-2014
Salam alaykoum, Ma mère a partagé un terrain entre mon frère et moi. Elle a rempli les papiers pour mon frère et moi devant notaire et témoins, puis, 20 ans plus tard, suite à des manipulations de mon frère et des pressions envers ma mère, celle-ci a changé d'avis et a porté plainte contre moi devant un tribunal pour récupérer cette hiba qui ne suscite aucun doute de par les témoins et le notaire. Cette histoire a divisé notre famille en deux clans. Je vis en France et le terrain se trouve en Algérie, c'est un don du gouvernement algérien car mon père Allah i rahmo est mort chahid. Elle veut le reprendre pour le donner à mon frère sous prétexte que je vis mieux que lui en France avec mes orphelins. Elle m'a exclue de son logement lors d'une visite et m'a vivement insultée. Nos autres frères et sœurs ont bénéficié de la part de ma mère, d'une maison, pour le moment, ma mère y vit. Le partage a été convenu devant notaire et témoins comme suit : le terrain partagé entre mon frère et moi, et la maison partagée entre ma sœur et mon autre frère d'un commun accord. Quel comportement dois-je adopter envers mon frère qui a accepté ce partage et qui a ensuite manipulé notre mère ; il m'a aussi volé l'argent que je lui envoyais pour la construction et il loue ma part du terrain à des étrangers sans mon accord. Quand je retourne chez moi en Algérie, je dois être hébergée car je n'ai plus de terre ou m'enraciner et cette affaire me coûte beaucoup d'argent et me prends ma santé. Quel comportement dois-je adopter face à ma mère qui refuse que je lui rende visite et qui s'est rendue complice de corruption en acceptant les méthodes de mon frère ? Quelles sont les sentences relatives aux dons que l'on reprend dans l'islam ? J'ai porté l'affaire en appel devant un tribunal civil et leur sentence leur appartient moi j'ai besoin de savoir ce qu'il en est devant Allah ? J'ai essayé à travers notre frère consanguin, qui est plus âgé que nous, de les exhorter et de leur parler calmement afin qu'ils retrouvent la raison et qu'ils craignent Allah, en vain. Je reçois quotidiennement des nouvelles de mon pays qui m'attristent et me cause beaucoup de soucis, ma mère et mon frère me calomnient auprès du reste de notre famille. Je crains pour ma mère le jour des comptes quand Allah nous questionnera sur nos actes, j'aimerais réparer cette situation sans toutefois renoncer à mon droit. Que préconise l'islam sur ces différents sujets ? Je vous remercie, qu'Allah accorde la miséricorde à vos pieux ascendants et descendants, qu'Il affermisse le cœur de tous les croyants et qu'Il facilite votre œuvre. Qu'Allah augmente votre science et votre lumière. Amine.
Louange à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses compagnons :
En principe, la donation est effective si elle a eu lieu de manière correcte et que la personne à qui elle est destinée en a pris possession, conformément à la parole du Messager d’Allah () rapportée par Ibn ‘Abbâs : Celui qui reprend ce qu’il a donné est semblable au chien qui vomit puis ravale son vomi. (Boukhari et Mouslim). La majorité des oulémas s’appuie sur ce hadith pour affirmer qu’il est interdit de reprendre ce qui a été donné excepté la donation qu’un père ou une mère a faite à son enfant en se basant sur le hadith qu’ont rapporté Ibn 'Umar et Ibn 'Abbâs (qu’Allah les agrée) et dans lequel le Prophète () a dit : Il n'est pas licite de révoquer une donation, sauf celle faite par le père à son enfant… [Ahmad, Abû Dâoud, al-Tirmidhî, al-Nasâ'î, Ibn Mâdja (al-Albânî : Sahîh)].
Ceci est l’avis de la majorité des oulémas dont Mâlik, al-Châfi'î et Ahmad dans la version la plus explicite. Il est permis au père ou à la mère de révoquer une donation faite à son enfant tant que celle-ci ne concerne pas le droit d’autrui, que l’enfant n’en a pas pris possession ou qu’à cause de celle-ci, l’enfant n’a pas contracté certains engagements car si c’est le cas il n’est pas permis de révoquer la donation. Ibn Abî Zayd al-Mâlikî a dit dans al-Risâla : Le père (ou la mère) a le droit de reprendre une donation faite à son enfant, qu’il soit petit ou grand, sauf si le don est la cause d’une promesse de mariage, d’une dette ou si un évènement augmente ou diminue considérablement sa valeur. Al-'Adawî a dit : “Cela signifie qu’il se produit un événement qui fait diminuer ou augmenter la valeur de cette donation car dans ce cas le père perd cette donation.” (al-Risâla et Charh al-Nafrâwî)
En se basant sur cela, il n’y a pas d’inconvénient à ce que votre mère reprenne ce qu’elle vous a donné, d’après ce que nous avons expliqué. Cependant, elle n’a pas le droit de le reprendre pour le donner à votre frère car le fait de favoriser certains enfants par rapport à d’autres en matière de donation n’est pas permis selon l’avis prépondérant des oulémas tant qu’il n’y a pas de justificatif valable, conformément au hadith dans lequel le Prophète () a dit à al-Bachîr ibn Sa'd : Craignez Allah et soyez équitables envers vos enfants. (Boukhari, Mouslim). Dans une variante de ce hadith rapporté par Ahmad, il a dit : Parmi les droits que tes enfants ont sur toi figure le fait que tu sois équitable envers eux.
Malgré tout cela, vous devez continuer à être bonne envers votre mère et à ne pas lui nuire par des paroles ou des actes. Il n’y a aucune vertu dans les biens de ce bas monde, qui sont voués à disparaître, si ceux-ci conduisent à rompre les liens de parenté avec sa mère, à lui nuire ou à l’accuser de ruser, de falsifier (les documents) et de mentir. Essayez autant que vous pouvez de vous réconcilier avec vos frères et soyez extrêmement bonne envers votre mère malgré ses défauts car il se peut qu’Allah, exalté soit-Il vous donne quelque chose en compensation de ce que vous avez perdu.
Le conseil que nous vous prodiguons est d’œuvrer pour vous rassembler et vous réconcilier avec votre famille et même si cela doit se faire en renonçant à votre bien. Quant à l’issue de cette affaire, c’est au juge de trancher.
Et Allah sait mieux.