Les contrats sont-ils Ă priori permis ou interdits ? Fatwa No: 345994
- Fatwa Date:10-1-2022
Je travaille en tant que programmateur indépendant. Je passe des contrats avec mes clients et leur envoie la facture à la fin de chaque mois en mentionnant le nombre d’heures que j’ai passé à m’occuper des tâches qu’ils m’ont confiées. Au cours du mois, il me règle la facture en fonction du taux horaire sur lequel nous nous sommes entendus. Par exemple, si nous avons fixé le taux horaire à 50 dollars de l’heure et que, au cours d’un mois, j’ai travaillé 100 heures sur leur projet, je leur envoie une facture de 5000 dollars à la fin du mois … J’ai une totale indépendance par rapport à eux – j’ai une société qui m’est propre – j’ai d’ailleurs plusieurs clients.
Aussi, il y a une entreprise avec laquelle j’ai signé un contrat dans lequel je m’engage à travailler pour eux 24 heures par semaine – soit trois jours par semaine – mais cette société ne me donne pas suffisamment de travail pour que je puisse combler les trois jours. J’ai donc demandé à mon interlocuteur au sein de cette société de me donner du travail supplémentaire et il arrive parfois qu’il en ajoute mais pas suffisamment pour arriver aux 24 heures de travail figurant sur le contrat. Ainsi, lorsque je leur envoie la facture avec le nombre d’heures que j’ai passé sur leur projet, le montant de la facture est très souvent bien inférieur aux 24 heures de travail hebdomadaire … Je gagne donc bien moins que ce qui était prévu …
J’ai donc demandé à m’arrêter durant un mois et j’ai trouvé un autre client. Mais la société a repris contact avec moi pour poursuivre notre collaboration. J’ai alors posé comme condition de revoir les clauses de notre contrat dans lequel je souhaite que soit stipulé que je m’engage à leur fournir 16 heures de travail par semaine et que le montant minimum de la facture serait fixe et ne pourrait être inférieur au montant correspondant à 16 heures de travail hebdomadaire. Et ce, que le travail confié me prenne 16 heures ou non. Par exemple, considérant qu’il y a quatre semaines dans le mois et que le taux horaire est fixé à 50 dollars de l’heure, ma facture mentionnera 16*4*50 = 3200 dollars au minimum. Et ce serait le montant minimum de ma facture mensuelle même si la société ne me donne aucun travail à faire. Ce montant sera versé en échange de la garantie de ma présence à leur service 16 heures par semaine. Par ailleurs, si cette société me confie du travail qui nécessiterait que je travaille plus de 16 heures par semaine alors le montant de la facture augmenterait en fonction du nombre d’heures supplémentaires passées à travailler sur leur projet. Cette condition que je souhaite faire figurer dans le contrat est-elle valide ?
Louange à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons :
Il n’y a aucun mal à poser une telle condition. Le salaire est connu de tous, il est de 3200 dollars par mois en échange de la garantie de leur réserver 16 heures de travail par semaine. Chaque heure supplémentaire sera payée 50 dollars.
Le principe de base qui régit les conditions est qu’elles sont à priori permises et valides. Des conditions ne peuvent être considérées comme interdites ou invalides uniquement dans le cas où un texte du Coran ou de la Sunna le stipule.
Dans son livre Al-Fatâwa al-Kubrâ, cheikh al-Islam Ibn Taymiyya a dit : La troisième règle concernant les contrats et les conditions : celles qui sont licites et illicites, celles qui sont valides et invalides. Les questions qui découlent de cette règle sont nombreuses. Il est possible d’en dégager deux avis :
Le premier : il est interdit de poser des conditions dans les termes d’un contrat sauf si un texte du Coran ou de la Sunna le permet. C’est l’avis des savants de l’école littéraliste (Al-Dhâhiriyya) et beaucoup de règles fondamentales de la jurisprudence de l’école de Abû Hanîfa et de Shâfi’î reposent sur ce principe. C’est également le cas d’une partie des savants de l’école de Malik et de Ahmad …
Le deuxième avis : Le principe de base qui régit les conditions est qu’elles sont à priori permises et valides. Des conditions ne peuvent être considérées comme interdites ou invalides uniquement dans le cas où un texte du Coran ou de la Sunna le stipule, ou éventuellement une analogie, pour ceux qui considèrent que cela constitue une preuve juridique. Aussi, les règles fondamentales de la jurisprudence de l’école de l’imam Ahmad – qu’Allah soit satisfait de lui -, telles qu’elles sont rapportées de lui, reposent sur cet avis. Malik a un avis très proche de celui-ci. Mais Ahmad est celui qui, des quatre imams, soutient le plus que les conditions d’un contrat sont valides. Fin de citation.
Ibn Taymiyya, qu’Allah lui fasse miséricorde, s’est longuement étalé dans le développement de cette question. Il en a discuté les différents aspects et a donné plusieurs exemples. Il a soutenu le deuxième avis et a dit : Si honorer un engagement et respecter un pacte est un impératif, alors on sait que le principe de base régissant les contrats et ses conditions est qu’ils sont valides. Si ce n’était pas le cas, il n’y aurait aucun sens à exiger d’honorer ses engagements et respecter les contrats. Mais puisque la religion l’exige, c’est qu’il est tout à fait permis et valide de conclure des contrats et poser des conditions … Fin de citation.
En un autre endroit de son livre, il dit : Les conditions qui ne s’opposent pas aux règles de la législation sont valides pour tous les types de contrat. Fin de citation.
Et Allah sait mieux.