Les premiers marchands musulmans arrivèrent sur la côte est-africaine vers le VIIIe siècle. L’archéologie atteste une présence musulmane sur l’île de Manda, dans l’archipel de Lamu, vers 830. En 1331, l’explorateur Ibn Battûta, qui visita une grande partie du monde musulman, constata une forte présence de l’Islam sur la côte est-africaine en 1331, il écrit à propos des musulmans qu’il rencontra alors : « Les habitants sont pieux, honorables, droits et ont des mosquées en bois ». Un siècle plus tard, le voyageur musulman chinois Zheng He signala les progrès des musulmans de la côte kényane à Malindi. Après leur arrivée par la mer, les musulmans s’établirent le long des côtes et développèrent le commerce. Des mariages exogames eurent lieu entre les commerçants, originaires du Chiraz et la population locale Bantoue, ce qui donna naissance au peuple Swahili, majoritairement musulman ; le langage swahili est structurellement bantou, mais avec de nombreux emprunts à l’arabe. Les marchands musulmans qui arrivèrent cherchaient plus à développer le commerce que l’Islam. L’arrivée des Portugais au XVe siècle mit un coup d’arrêt à un lent progrès. Par ailleurs, les nombreux conflits tribaux suscitaient des efforts de pacification qui se faisaient parfois au détriment des efforts d’islamisation.
Puis le Kenya dut se soumettre au colonisateur anglais en 1895, cette date mit fin à la domination d’une dynastie omanaise, les Bûsa’îd, qui dura seize années. Il faut savoir que les colonisateurs britanniques usèrent de diverses ruses néfastes afin de se débarrasser de la langue arabe, et notamment en imposant l’écriture en lettres latines, le but étant d’éloigner les musulmans de ce pays de leur Coran ; par ailleurs, les anglais firent enlever l’éducation islamique des programmes scolaires. Mais en 1963, le Kenya se libéra enfin du joug britannique et obtint son indépendance.
Aujourd’hui, les musulmans représentent un peu plus de 10 % de la population kenyane ; toutefois, ils sont très actifs, c’est ainsi par exemple qu’ils possèdent environ 70 associations majeures les représentant dont le Haut comité des musulmans du Kenya. De plus, le nombre des petites structures et organisations islamiques atteint environ les 400. Notons que la capitale Nairobi compte plus d’un demi-million de musulmans, de même qu’il y a dans cette ville plus de trente mosquées. Signalons en sus que l’on y trouve de nombreuses traductions du Noble Coran ainsi que de nombreux livres sur l’Islam en anglais bien sûr mais également en langue swahilie, il paraît aussi une revue sur l’Islam en anglais. Par ailleurs, on trouve à la capitale des lieux où il est possible d’assister à des cours sur l’Islam en différentes langues ainsi que de nombreux instituts prodiguant l’enseignement du Noble Coran.
Il nous faut évoquer un grand cheikh kenyan, al-Âmîn ‘Alî al-Mâzrawî, ce dernier a été très influencé par les mouvements de réforme islamiques qui ont vu le jour dans tout le monde musulman au cours du siècle dernier. Ce cheikh fut à l’origine de deux journaux, l’un en arabe et l’autre en swahili, de même qu’il fonda une école arabe dans la ville de Chila, puis des branches de cette dernière furent créées aux quatre coins du pays. En 1963, il fonda l’Ecole islamique à Nairobi ainsi qu’un certain nombre d’autres projets islamiques dans tout le pays.
Toutefois, malgré cette forte présence et cette activité importante, les musulmans kenyans font face à plusieurs problèmes dont le plus important est la diminution de leur poids politique et donc leur impossibilité de jouer un rôle correspondant à leur situation effective dans le pays. Il faut néanmoins signaler que si les musulmans n’occupent que des positions politiques secondaires, cela représente une avancée importante comparée à ce que les musulmans vécurent en termes de persécutions et de discriminations sous de précédents gouvernements kenyans.
En outre, notons que dans l’Est et le Nord du Kenya on ne trouve aucune université musulmane, à l’inverse des régions de l’Ouest et du Sud. De plus, les divers gouvernements successifs ont souvent délibérément marginalisé les régions musulmanes et empêché le financement des plans de développement dont elles avaient besoin, et ce, afin que les musulmans restent dans la misère et l’ignorance, et donc qu’ils deviennent des proies faciles pour les églises évangéliques qui jouent un rôle de plus en plus prépondérant dans le pays.
En somme, les musulmans du Kenya doivent mieux s’organiser et fonder des institutions pouvant les encadrer et les protéger, et parmi les autres choses concrètes dont ils ont un besoin pressant on trouve : la formation de bons prédicateurs maîtrisant la langue swahilie ; la fondation d’organisations éducatives et notamment des universités islamiques qui font cruellement défaut dans certaines régions ; la formation d’une union des musulmans qui fédérerait tous les musulmans kenyans ; le fait de permettre aux jeunes musulmans d’intégrer aisément des universités arabes et islamiques à l’étranger ; le fait d’éviter à tout prix la division religieuse des musulmans kenyans ainsi que la diffusion parmi eux du chiisme et des croyances s’opposant gravement à la foi islamique ; ou enfin la constitution d’organisations islamiques kenyanes ayant pour principal but d’apporter aide et soutien aux musulmans les plus nécessiteux.
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